PHOTOGRAPHIE D’UNE ŒUVRE D’ART DANS L’ESPACE PUBLIC ET DROIT D’AUTEUR. LA THEORIE DE « L’ACCESSOIRE » OU DE « L’INCLUSION FORTUITE ».

Peut-on photographier une œuvre d’art graphique ou plastique dans l’espace public ?

👁️ L’application de l’exception de panorama et les œuvres de street art

L’exception de panorama, évoquée dans notre précédent article [1], n’a vocation à s’appliquer qu’aux œuvres architecturales et sculpturales. Elle ne s’applique pas aux œuvres d’art graphiques et plastiques.

C’est notamment ce qu’a rappelé la Cour d’appel de Paris dans son arrêt en date du 5 juillet 2023 [2] infirmant le jugement qui avait appliqué l’exception de panorama à une œuvre de street art. Le litige portait sur les clips de campagne d’un parti politique français ayant reproduit, sans l’autorisation de son auteur, une peinture murale dénommée Marianne asiatique réalisée par l’artiste Combo sur un immeuble situé Boulevard du Temple à Paris. L’artiste avait alors assigné le parti politique en invoquant une violation de son droit d’auteur.

Les juges de première instance ont d’abord retenu une interprétation extensive de l’article L.122-5 alinéa 11 du code de la propriété intellectuelle considérant que l’exception permettait « à toute personne de photographier, filmer, dessiner, etc. les œuvres d’architecture et de sculpture, ainsi que les graffitis dont ils sont éventuellement couverts dès lors qu’ils sont situés en permanence sur la voie publique […] [3] ».

La Cour d’appel a censuré les juges du fond [4]. L’exception de panorama, comme toute exception au droit d’auteur, doit être interprétée strictement.

Or, l’alinéa 11 de l’article L.122-5 du code de la propriété intellectuelle ne vise que les œuvres architecturales ou sculpturales et non les œuvres d’art graphiques ou plastiques.

Ensuite, une œuvre de street art comme la peinture murale de Combo ne peut être considérée comme placée « en permanence sur la voie publique » au sens de l’article L.122-5 alinéa 11 du code de la propriété intellectuelle, dans la mesure où l’œuvre est constituée de papier collé et est donc particulièrement sensible aux aléas extérieurs.

L’œuvre de street art doit donc, a priori, être regardée comme une œuvre graphique ou plastique et ne peut prétendre au bénéfice de l’exception de panorama.

Cependant, la Cour d’appel laissait entendre qu’une telle œuvre aurait pu bénéficier de la théorie de l’accessoire, si les conditions avaient été réunies en l’espèce. Cette théorie est une limitation au droit exclusif de l’auteur sur son œuvre et permet, sous certaines conditions, de ne pas tomber sous le coup de la contrefaçon lorsqu’une œuvre est reproduite sans l’autorisation de son auteur.

 

👁️ Qu’est-ce que la théorie de l’accessoire et comment s’applique-t-elle ?

La théorie de « l’accessoire » (ou de « l’inclusion fortuite ») est une création prétorienne dégagée par la Cour de cassation dans la célèbre Affaire de la Place des Terreaux [5], puis définitivement consacrée dans l’arrêt Être et avoir du 12 mai 2011 [6].

Elle permet de reproduire une œuvre protégée, sans l’autorisation de son auteur, dans une photographie, un film, un dessin, etc., et ce, dans la mesure où l’œuvre protégée n’en constitue pas le sujet principal. La raison est d’abord pragmatique : nombreux sont les objets protégés par le droit d’auteur qui peuvent figurer involontairement ou en arrière-plan d’une prise de vue. C’est également une manière de garantir la liberté d’expression et in fine la liberté de création.

📌 A noter : Cette limitation est souvent assimilée à l’une des exceptions au droit d’auteur listées par la Directive de 2001. En effet, l’article 5 § 3, i) autorise les Etats membres à prévoir des exceptions ou limitations au droit de reproduction « lorsqu’il s’agit de l’inclusion fortuite d’une œuvre ou d’un autre objet protégé dans un autre produit [7] ».

 

Toutefois, il est nécessaire de distinguer les notions d’accessoire et d’inclusion fortuite qui n’ont pas strictement le même sens. L’accessoire s’oppose à ce qui est principal ou essentiel, tandis que l’inclusion fortuite renvoie au hasard, à ce qui est involontaire. Un objet peut être accessoire – figurer en arrière-plan par exemple – tout en étant volontairement incorporé dans l’œuvre nouvelle.

 

❓ Dès lors, faut-il que la reproduction de l’œuvre soit accessoire ou fortuite ?

En fait, la théorie de l’accessoire ou de l’inclusion fortuite implique que la reproduction soit…accessoire et fortuite !

L’inclusion volontaire d’une œuvre préexistante nécessite l’autorisation de son auteur, et ce, quand bien même elle n’apparaitrait que de manière limitée ou comme élément de décor. C’est notamment ce qu’a rappelé récemment la Cour d’appel de Paris dans un arrêt rendu le 27 septembre 2023 [8].

🏮 En l’espèce, un architecte d’intérieur avait commandé à un sculpteur plasticien plusieurs lampes « lyres » pour aménager notamment un hôtel en Suisse. En 2011, ce même architecte a posté sur ses réseaux sociaux deux photographies le montrant aux côtés d’une de ces lampes. Le sculpteur a intenté une action en contrefaçon et l’architecte a invoqué en défense la théorie de l’accessoire ; la lampe « lyre » figurant dans le décor des deux photographies. Pour la Cour d’appel de Paris, cela n’est cependant pas suffisant, selon elle, la conception retenue dans la Directive de 2001 d’« inclusion fortuite dans un autre produit » doit s’entendre « comme une représentation accessoire et involontaire par rapport au sujet traité ou représenté [9] ».

 

⚠️ Cette exception est souvent invoquée comme moyen de défense dans les procès en contrefaçon, mais rares sont les cas où les juges admettent le bénéfice d’une telle exception. Or, la reproduction d’une œuvre sans l’autorisation de l’auteur en dehors du cadre des exceptions expose :

  • Sur le fondement de la responsabilité civile, à une condamnation à des dommages et intérêts.
  • Une peine de trois ans d’emprisonnement et à 300.000 € d’amende [10], la contrefaçon constituant un délit.

 

📸 Voici quelques exemples concrets pour vous aider à vous y retrouver :

Des œuvres de street art figurent sur vos photographies de rue :

👾 L’œuvre de street art est une œuvre d’art graphique ou plastique protégée par le droit d’auteur, et à ce titre, vous pouvez bénéficier de l’exception de l’accessoire :

  • Si l’œuvre qui apparaît est accessoire par rapport au sujet représenté ou traité dans la prise de vue.
  • Si l’œuvre apparaît fortuitement par rapport au sujet représenté ou traité dans la prise de vue

Vous réalisez des prises de vue incluant des œuvres placées sur la voie publique, comme la Fontaine Stravinsky de Nikki de Saint Phalle et Jean Tinguely :

Dans la mesure où la Fontaine Stravinsky est une œuvre sculpturale placée en permanence sur la voie publique, c’est l’exception de panorama qui aura vocation à s’appliquer et non pas la théorie de l’accessoire. En revanche, si l’œuvre sculpturale n’était pas placée de manière pérenne – par exemple à l’occasion d’une exposition temporaire – c’est la théorie de l’accessoire qui viendrait à s’appliquer !

Vous réalisez des prises de vue dans un musée :

La théorie de l’accessoire a vocation à s’appliquer même dans les espaces intérieurs [11]. Là encore, vous devez vous demander si vous rentrez dans le cadre de la théorie de l’accessoire.

💡 Si les œuvres sont dans le domaine public, vous n’aurez pas besoin de l’autorisation des ayants-droits pour filmer les œuvres, mais seulement de l’autorisation du musée pour tourner dans les locaux [12]. Pour cela, rapprochez-vous des services dédiés du musée concerné.

 

Nous vous remercions pour la lecture de ce dernier article du Focus n°1.

 

[1] Notre précédent article sur l’exception de panorama est disponible en suivant ce lien.

[2] Paris, 5 juillet 2023, n°21/11317.

[3] TGI Paris, 3e ch., 1ère section, 21 janvier 2021.

[4] Paris, 5 juillet 2023, n°21/11317.

[5] Cass, 1ère civ., 15 mars 2005, n° 03-14.820.

[6] Cass. 1ère civ., 12 mai 2011, n° 08-20.651.

[7] Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, 5 § 3, i).

[8] Cour d’appel de Paris, 27 septembre 2023 n°21/12348.

[9] Ibid.

[10] Article 335-2 du code pénal.

[11] C’est notamment ce qu’avait consacré l’arrêt Être et avoir suscité.

[12] C’est généralement la formule consacrée par les musées lorsque vous envisagez de réaliser des photographies à titre professionnel ou commercial. Voir, à titre d’illustration, les modalités prescrites par le Musée d’Orsay.  

Ordonnance du Tribunal Judiciaire de Paris, Service des référés, 10 octobre 2024, n°24/52939

Une maison de vente aux enchères a été mandatée pour vendre une sculpture d’Alberto Giacometti pour le compte d’un particulier. La sculpture a recueilli un avis défavorable de la Fondation Alberto et Annette Giacometti la qualifiant de « tirage défectueux », non conforme au plâtre original de l’artiste, et ne devant pas être inscrite au catalogue raisonné rédigé par la Fondation.

La maison de vente a fait appel à un expert indépendant, qui ayant comparé la sculpture avec un autre exemplaire de l’œuvre appartenant au centre Pompidou, a conclu que les deux œuvres étaient identiques. Ce même expert a souhaité examiner l’exemplaire appartenant à la Fondation Giacometti, mais celle-ci a refusé soutenant que cette sculpture était une contrefaçon.

La maison de vente a sollicité une expertise judiciaire quant à l’authenticité de la sculpture sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile (CPC).

Le juge des référés a rejeté la demande d’expertise en application de l’article 145 du CPC qui permet, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve d’agissements, de solliciter des mesures d’instruction sur requête en référé. Selon lui, il n’existe aucun argument permettant de « projeter ce litige futur comme plausible et crédible » et « l’action est manifestement vouée à l’échec » car aucune action en responsabilité de la Fondation ne saurait prospérer sur le refus de reconnaitre l’authenticité de l’œuvre. Le juge des référés rappelle que le titulaire du droit moral n’a pas le devoir de se prononcer sur l’authenticité de chaque œuvre.

Plus précisément, sur la question de la responsabilité de la Fondation de ne pas authentifier l’œuvre, le tribunal répond :

  • Qu’il ne saurait être reproché aucune faute ou aucun abus au titulaire du droit moral d’un auteur à exprimer un avis sur l’authenticité d’une œuvre fondé sur l’analyse d’un « comité d’experts reconnus dans le domaine »;
  • Que le droit moral au respect du nom ne donne pas le devoir aux titulaires de celui-ci « de se prononcer sur l’authenticité de chaque œuvre qu’on lui présente, ni à fortiori de modifier son avis à chaque fois qu’on lui présente des éléments nouveaux ». Qu’ainsi, ce titulaire n’est pas un « certificateur obligatoire ».

Cour administrative d’appel de Paris, 7ème chambre, 17 octobre 2024, n°23PA00612

Pour les amateurs d’objets d’art et d’antiquités, l’achat puis la revente de certaines pièces de leur collection est une pratique courante. Cependant, selon l’administration fiscale, ces actes peuvent être constitutifs d’une activité commerciale s’ils remplissent certains critères. L’activité d’un amateur de vins a ainsi été requalifiée après qu’il a fait l’objet d’une vérification de comptabilité.

A l’issue de cette vérification, l’administration fiscale a émis une proposition de rectification fiscale considérant que le particulier exerçait une activité occulte de négociant. Dans un arrêt du 17 octobre 2024, la cour administrative d’appel de Paris a en effet jugé que l’activité de vente de vins en cause présentait un caractère commercial et que le particulier était dès lors passible de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et de la TVA.

→ Pourquoi l’activité de ce particulier interrogeait-elle ?

En l’espèce, le particulier avait acheté plusieurs bouteilles de vin Pétrus auprès d’un marchand, pour 25.620 euros. Quelques mois après, il les avait revendues à un négociant bordelais, pour un prix total de 98.400 euros.

→ Les juges du fond ont d’abord retenu la qualification de collectionneur

Pour retenir qu’il n’avait pas exercé d’activité commerciale, le tribunal administratif de Paris a soulevé que le particulier avait acquis 698 bouteilles au cours des dix dernières années et qu’il n’avait revendu que 9% d’entre elles. Ainsi, il ne s’était pas livré « habituellement, pour son propre compte et dans un but lucratif, à une activité d’achat de vins en vue de leur revente ».

Le ministre de l’économie a fait appel de jugement du 18 octobre 2022.

→ La cour administrative d’appel a finalement retenu la qualification de marchand

La cour administrative d’appel a soulevé que :

  • Le particulier n’a pas disposé physiquement des bouteilles de vin qui ont été achetées en « primeur », c’est-à-dire avant leur mise en bouteilles, revendues puis livrées directement à un marchand ;
  • Le particulier disposait d’un compte fournisseur auprès de ce marchand à qui il revendait les bouteilles ;
  • Eu égard à l’importance et la fréquence des transactions, les bouteilles ont été conservées très peu de temps.

Par conséquent, le particulier « ne s’est pas comporté comme un simple collectionneur de vins mais comme ayant eu une activité commerciale de négociant de vins à titre individuel et dans un but lucratif ».

→ Quels sont les critères de distinction ?

Plusieurs facteurs principaux sont à prendre en considération afin de distinguer le « simple collectionneur » du marchand, et donc, du commerçant :

  • Le but lucratif de l’opération : le juge recherche ici l’intention spéculative même s’il ne s’agit que d’une opération[1].
  • La fréquence des opérations[2].
  • Le délai entre l’achat et la revente : la brièveté du délai sert à déterminer l’intention spéculative.
  • La possession physique des biens achetés destinés à une collection[3].
  • L’intégrité du lot revendu[4].

→ Rappels sur le statut de commerçant

L’article L.121-1 du code de commerce dispose que « sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle ».

L’article L.110-1 dudit code définit les actes de commerce comme « 1° tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en œuvre […] ».

Le statut de commerçant engendre, suivant les plafonds en vigueur, l’assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA)[5] :

  • Si l’entreprise dépasse le seuil de 91.900 € de ventes annuelles, sans outrepasser 101.000 €, elle peut conserver le bénéfice de la franchise en base de TVA pendant 2 ans.
  • Cependant, si ce seuil de tolérance de 101.000€ est franchi, l’entreprise perd le régime de la franchise en base de TVA à partir du premier jour du mois suivant le dépassement.

ATTENTION à compter du 1er janvier 2025, toutes les ventes d’œuvres d’art, d’objets de collection ou d’antiquités seront soumises au taux réduit de TVA de 5,5 %, sauf exception. Cela signe la fin du régime de la TVA sur la marge à 20% applicable aux objets d’occasion.

En tout état de cause, face à une situation incertaine, il est nécessaire de se faire accompagner dans la démarche d’achat et de revente afin de prendre des mesures adaptées et régulariser une activité commerciale.

En effet, le risque d’un redressement fiscal est considérable, comme l’illustre le présent cas. Les cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu ont finalement été remise à la charge du particulier pour un montant de 71.240 €. Outre le montant réclamé, le redressement peut entraîner des pénalités, des intérêts de retard voire des sanctions pénales en cas de fraude.

[1] A titre comparatif, l’administration fiscale a requalifié un contribuable en marchand de biens et imposé le profit en tant que tel, ce dernier ayant acquis trois immeubles, et procédé, après division en lots, à 7 ventes dans un délai de 3 à 18 mois après acquisition (CAA de NANTES, 1ère chambre, 4 octobre 2018, 17NT0102).

[2] S’il est vrai que la législation fiscale se rapporte à la définition du commerçant telle qu’on la trouve à l’article L. 121-1 du code de commerce, le juge peut ne considérer qu’une opération ponctuelle, et faire passer la « fréquence » et « l’habitude » au second plan.

[3] On peut toujours vendre tout ou partie d’une collection, sans pour autant que la vente soit qualifiée d’acte de commerce. Il faut que le bien ou le lot aient enrichi la collection. C’est la démarche du collectionneur qui est ici scrutée.

[4] Le juge regardera si le lot qui a été vendu est exactement identique au lot acheté ; il pourra en déduire la volonté d’acheter pour revendre, plutôt que d’enrichir une collection.

[5] L’article 256A du Code général des impôts (CGI) retient que sont soumises à la TVA « toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de service ».

Le 27 septembre 2024, la Cour suprême de Tasmanie (Australie) a jugé que l’exposition Ladies Lounge, interdite aux hommes, pouvait faire exception au principe de non-discrimination, dans la mesure où elle permettrait de « promouvoir l’égalité des chances » et de « mettre en évidence la discrimination sociétale fondée sur le genre ».

Depuis 2020, le Museum of Old and New Art (MONA) de Hobart (Tasmanie) présentait une œuvre immersive intitulée le « Ladies Lounge », créée par l’artiste et conservatrice américaine Kirsha Kaechele (1976-).

Le « Ladies Lounge » est un salon exclusivement réservé aux femmes, dans lequel sont présentées diverses œuvres, la sélection des artistes servant le propos de Kirsha Kaechele[1]. Le processus d’admission ou de refus à l’entrée du salon et les interactions au sein de ce dernier sont une partie intégrante de l’expérience voulue par l’artiste.

Son intention est de répondre à l’exclusion historique des femmes de certains espaces publics en Australie[2], et de souligner les inégalités qu’elles subissent encore à ce jour[3].

Par une décision du 9 avril 2024, le tribunal civil et administratif de Tasmanie (TASCAT) a toutefois estimé que l’exclusion des hommes constituait une discrimination directe, interdite par la loi et a enjoint au musée d’ouvrir l’exposition à tous, ou de la fermer pour tous, dans un délai de 28 jours.

Une plainte pour discrimination avait, en effet, été déposée auprès du Commissaire à la lutte contre la discrimination[4] par un visiteur s’étant vu refuser l’accès au Ladies Lounge, en avril 2023.

Un recours a été formé contre la décision du TASCAT par le MONA.

Dans l’attente d’une nouvelle décision, l’artiste a fait le choix de déplacer les œuvres dans les toilettes pour femmes du musée, de manière à maintenir l’exclusion des hommes.

Dans cette affaire, deux principes fondamentaux sont donc mis en balance : la liberté d’expression artistique et le principe de non-discrimination. Le débat est lancé !

 

→ Le principe de non-discrimination ne fait-il pas obstacle à une telle exposition ?

En Tasmanie, le « Anti-discrimination Act » de 1998 prohibe expressément les discriminations directes, soient les comportements visant à traiter défavorablement une personne en s’appuyant sur un motif interdit par la loi, comme le genre (article 16(e)).

La Cour suprême était appelée à se prononcer sur l’exception au principe de non-discrimination lorsque l’action vise à promouvoir l’égalité des chances pour un groupe de personnes défavorisées (article 26 dudit acte[5]).

Pour retenir l’application de cette exception, la Cour fait le constat suivant :

  • Le Ladies Lounge n’a pas pour objectif de mettre à disposition un espace pour les femmes artistes, l’exposition présentant indifféremment des œuvres d’artistes féminins et masculins[6];
  • La démarche vise plutôt à proposer l’expérience de la discrimination telle qu’elle a été vécue par les femmes à travers le temps et invite à réfléchir à ces inégalités en refusant l’accès aux hommes ;
  • Ainsi, le Ladies Lounge vise à promouvoir l’égalité des chances.

Par conséquent, la décision du 9 avril 2024 a été annulée et l’affaire renvoyée devant le tribunal civil et administratif de Tasmanie qui devra à nouveau apprécier le fond.

 

→ Une telle solution a-t-elle vocation à s’appliquer en France ? Un artiste peut-il s’exprimer sans limite ?

Tous ceux qui « créent, interprètent, diffusent ou exposent une oeuvre d’art »[7] sont protégés par la liberté d’expression artistique. Elle découle de la liberté d’expression définie par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui constitue l’une des « conditions primordiales [au] progrès » [8] d’une société démocratique.

La liberté d’expression peut toutefois être soumise à certaines restrictions prévues par la loi, lorsque celles-ci constituent des mesures nécessaires. L’article 10, § 2, de la CEDH énumère les buts légitimes suivants : « constituent des mesures nécessaires à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire ».

L’oeuvre ne doit pas véhiculer d’incitations à la discrimination[9], à la haine ou à la violence[10]. Toutefois, dès lors qu’elle cherche à transmettre un message suscitant le débat public, les juges mettent en balance l’exercice de la liberté d’expression avec le droit fondamental auquel il est porté atteinte. La restriction à ce droit devra être avant tout proportionnée.

A ce titre, les tribunaux français ont par exemple fait prévaloir la liberté de création et de diffusion artistiques sur l’atteinte à la dignité humaine, s’agissant d’œuvres dénonçant des traitements particulièrement violents infligés à des enfants[11] (vous pouvez, sur ce point, vous référer à notre précédent article).


[1] Kirsha Kaechele explique : « pour que les hommes se sentent les plus exclus possible, le salon devait exposer les œuvres d’art les plus importantes au monde – les meilleures » (pour en savoir plus sur la démarche de l’artiste v. : K. Kaechele, « « Art is not truth » : Pablo Picasso », MONA blog, 9 juill. 2024).

[2] Jusque dans les années 1970-1980, les femmes australiennes ne pouvaient fréquenter les bars publics et étaient confinées au « salon des dames » ou au jardin de la bière à l’extérieur.

[3] Le MONA a produit, au soutien de ses prétentions, le Bulletin d’information sur la situation des femmes (2024), publié par le gouvernent australien à l’occasion de chaque Journée internationale de la femme. Ce dernier comprend les données les plus récentes disponibles et met en évidence des donnés clés sur les problèmes d’égalité sociale et économique auxquels sont confrontées les femmes en Australie.

[4] Le “Equal Opportunity Tasmania” est le bureau du commissaire à la lutte contre la discrimination.

[5] Article 26 du ‘Anti-Discrimination Act’ : “A person may discriminate against another person in any program, plan or arrangement designed to promote equal opportunity for a group of people who are disadvantaged or have a special need because of a prescribed attribute”.

[6] Le tribunal civil et administratif de Tasmanie avait retenu, à tort, que le Ladies Lounge avait pour objectif de souligner le manque de visibilité dont souffrent les artistes femmes lors des expositions publiques. Il était avancé que le fait d’interdire l’accès aux hommes ne pouvait favoriser la possibilité pour les artistes femmes d’exposer leurs œuvres. A ce titre, les juges avaient rejeté l’application de l’article 26.

[7] CEDH, arrêt du 3 mai 2007, Ulusoy e.a. c. Turquie, n° 34797/02, § 42 cité par Cass. AP, 17 décembre 2023, n°21-20.723.

[8] CEDH, 7 décembre 1976, Handyside c/ Royaume-Uni, § 49 et Cons. Constit. 4 avril 2019, n°2019-780.

[9] Rappelons qu’au sens des articles 225-1 et suivants du code pénal, constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques sur le fondement notamment de leur origine ou de leur sexe. La discrimination est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende lorsqu’elle consiste à refuser la fourniture d’un bien ou d’un service ou à subordonner la fourniture d’un bien ou d’un service à une condition fondée sur l’un des éléments visés à l’article 225-1.

[10] Au sens de l’article 24, alinéa 7, de la loi du 29 juillet 1881. Pour que l’infraction soit constituée, il faut que ce qui ait été dit ou écrit puisse être compris comme une incitation manifeste, une instigation, une exhortation à des sentiments discriminatoires (Crim. 8 nov. 2011, n° 09-88.007).

[11] Cass. 17 novembre 2023, n°21-20.723.

PHOTOGRAPHIE DANS LA RUE ET IMAGE DES BIENS SUR LA VOIE PUBLIQUE. PAS D’INQUIÉTUDE DANS LA PRISE DE VOS SELFIES !

Quels sont les risques et les enjeux de photographier les œuvres architecturales au regard du droit d’auteur ?

En 2001, le Parlement européen a décidé de laisser chaque État membre choisir s’il voulait adopter ou non une exception de panorama obligatoire. En 2015, la question est relancée avec l’adoption par le Parlement européen du rapport dit « Reda », relatif à la mise en œuvre de la directive de 2001, qui recommande d’harmoniser l’exception de panorama au sein de l’Europe. De quoi s’agit-il exactement ? Qu’est‑ce que l’exception de panorama et pourquoi est-elle si débattue ces dernières années ?

⚖️ Introduite en France par la loi du 7 octobre 2016, dite « pour une République numérique », l’exception de panorama permet à toute personne de reproduire et représenter des œuvres architecturales et sculpturales situées en permanence dans des espaces publics, tant que cela n’est pas fait à des fins commerciales. Ce principe est inscrit à l’article L. 122-5, 11° du Code de la propriété intellectuelle. Cela signifie que vous pouvez prendre des photos de bâtiments ou de sculptures visibles dans la rue et les partager, tant que vous n’en tirez pas de profit commercial.

Le droit français a ainsi choisi de subordonner l’exception de panorama à la condition supplémentaire d’un usage non-commercial, rendant son champ d’application beaucoup plus restreint par rapport à l’exception « européenne »[1].

Pour mieux comprendre les implications de cette législation, voici quelques réponses aux questions pratiques les plus courantes.

 

  • Puis-je partager le selfie que j’ai pris devant la Tour Eiffel de nuit sur mes réseaux sociaux ?

La Tour Eiffel, monument symbolique de la capitale française, achevée en 1889, n’est plus protégée par le droit d’auteur. En effet, soixante-dix ans se sont écoulés depuis la mort de son architecte, Gustave Eiffel, rendant désormais libre l’exploitation de l’image de la Tour Eiffel. Des photos ou des selfies devant la Tour Eiffel peuvent donc être pris, sans avoir à demander l’autorisation des ayants-droits de M. Eiffel.

Il n’en est pas de même si l’on prend un selfie avec la Tour Eiffel illuminée. L’illumination de 5 minutes qui se déclenche à la tombée de la nuit, au début de chaque heure, est protégée par le droit d’auteur. L’exploitation de l’image de la Tour Eiffel la nuit n’est donc pas libre, mais conditionnée à l’autorisation préalable de la Société d’Exploitation de la Tour Eiffel (SETE).

Sans cette autorisation, vous vous exposez à trois ans d’emprisonnement et à 300.000 € d’amende.

 

🥑 Nos conseils :

Vous êtes un particulier qui a pris une photographie pour la partager avec vos proches, vous n’avez donc rien à craindre.

Vous êtes un influenceur, photographe professionnel, éditeur ou tout autre professionnel et vous voudriez partager la photo de nuit sur les réseaux sociaux pour alimenter votre activité commerciale, vous devez alors demander l’autorisation à la Société d’Exploitation de la Tour Eiffel (SETE), sous peine d’être exposé aux sanctions évoquées.

 

  • Et s’il s’agit d’un selfie devant la Pyramide du Louvre, la solution est-t-elle la même ?

La Pyramide du Louvre, construite en 1989 par l’architecte Ipoh Ming Pei est encore protégée par le droit d’auteur. L’exploitation de son image ne sera libre qu’en 2089, soixante-dix ans après la mort de son architecte, intervenue le 16 mai 2019. Et entre-temps ?

Toute personne physique prenant un selfie devant la Pyramide et le partageant sur ses réseaux sociaux, doit demander l’autorisation des ayants droits de Ipoh Ming Pei ; à condition, encore une fois, que le selfie soit partagé à des fins commerciales.

L’exception de panorama remplit son rôle : elle protège toute personne physique, dont la seule intention est de capturer un bon moment et de le partager avec ses amis.

 

  • Et le Domaine de Chambord ?

Les domaines nationaux sont des ensembles immobiliers présentant un lien exceptionnel avec l’histoire de la Nation[2]. Le Domaine de Chambord, comme tous les domaines nationaux, fait partie du domaine public.

L’exception de panorama introduite par le législateur n’est pas destinée à s’appliquer aux ensembles ayant un caractère historique et artistique. Néanmoins, en 2016, le législateur a ajouté des dispositions spéciales dans le code du patrimoine visant à « permettre la valorisation économique du patrimoine que constituent ces domaines nationaux[3] ».

Ces dispositions viennent limiter l’exploitation de l’image de la vingtaine de domaines nationaux, dont le domaine de Chambord fait partie. En effet, l’article L. 621-42 du code du patrimoine dispose que « l’utilisation à des fins commerciales de l’image des immeubles qui constituent les domaines nationaux, sur tout support, est soumise à l’autorisation préalable du gestionnaire de la partie concernée du domaine national[4]. »

Le gestionnaire du domaine qui reçoit cette demande est tenu d’accorder une autorisation, soit à titre gratuit, soit à titre onéreux. Ce dernier ne peut refuser l’exploitation de l’image du domaine que dans le cas où « l’exploitation commerciale envisagée porte atteinte à l’image de ce bien présentant un lien exceptionnel avec l’histoire de la Nation[5] ».

À défaut d’une demande préalable d’autorisation, l’utilisation à des fins commerciales des prises de vues d’un immeuble inclus dans la liste des domaines nationaux, constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l’utilisateur à l’égard du propriétaire ou du gestionnaire de l’immeuble[6].

⚠️ L’autorisation n’est toutefois pas requise si l’utilisation à des fins commerciales poursuit également une finalité visée par le texte, à savoir « finalité culturelle, artistique, pédagogique, d’enseignement, de recherche, d’information, d’illustration de l’actualité ou liée à l’exercice d’une mission de service public[7] ».

 

🥑 Nos conseils :

Vous êtes un particulier et vous envisagez un usage à titre privé, vous n’avez donc là encore rien à craindre.

Vous êtes un influenceur, photographe professionnel, éditeur ou tout autre professionnel et vous voudriez partager la photo du Domaine de Chambord ou d’un autre domaine national pour votre activité commerciale, demandez l’autorisation au gestionnaire du domaine concerné, sous peine de voir votre responsabilité pour faute engagée.

Cette autorisation ne pourra, par ailleurs, pas vous être refusée, à moins que le gestionnaire considère que l’exploitation envisagée porte atteinte à l’image du domaine.

⚠️ Vous estimez poursuivre une finalité visée par le texte ? L’autorisation n’est en théorie pas nécessaire. Néanmoins, nous vous recommandons de vous rapprocher d’un conseil. Notre cabinet se tient à votre disposition si vous avez des questions.

💡Avant toute exploitation d’un domaine, pensez à consulter la liste de l’article R. 621-98 du code du patrimoine pour voir si le domaine, dont vous souhaitez exploiter l’image, est inscrit au titre des domaines nationaux.

 


[1] Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, article 5, 2. h).

[2] Article L. 621-34 du code du patrimoine.

[3] Conseil constitutionnel, 2 février 2018, Assoc. Wikimédia France et a., n° 2017-687 QPC, 10.

[4] Article L. 621-42 du code du patrimoine.

[5] Conseil constitutionnel, 2 février 2018, Assoc. Wikimédia France et a., n° 2017-687 QPC, 12.

[6] Conseil d’État, 13 avril 2018, Éts public du domaine national de Chambord c/ Sté Les Brasseries Kronenbourg, n°397047.

[7] Conseil constitutionnel, 2 février 2018, Assoc. Wikimédia France et a., n° 2017-687 QPC, 11.

Cour d’appel, Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 4 avril 2024, n°23/04404

Dans un arrêt du 4 avril 2024, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a annulé le placement sous séquestre de la sculpture Mademoiselle Rachel chantant la Marseillaise d’Albert-Ernest Carrier-Belleuse, ordonné par le président du tribunal judiciaire de Marseille à la demande de l’Etat.

L’œuvre avait été prêtée par son propriétaire, domicilié en Suisse, à un musée d’Histoire français dans le cadre d’une exposition temporaire.

L’Etat a alors souhaité procéder à sa revendication à raison de son appartenance au domaine public, et empêcher sa sortie du territoire français le temps de la procédure judiciaire.

Dans un premier temps, l’Etat s’est rapproché du prêteur afin de convenir avec lui, à l’amiable, des perspectives de restitution. La tentative est toutefois restée sans réponse.

Par ordonnance sur requête du 23 juin 2022, le tribunal judiciaire de Marseille a ordonnée le séquestre de l’œuvre et l’a confiée au musée.

Le propriétaire de l’œuvre a sollicité la rétractation de la requête mais le président du tribunal judiciaire de Marseille l’a débouté de ses demandes, par ordonnance du 3 mars 2023.

Le 24 mars 2023, le propriétaire a interjeté appel aux motifs qu’il n’y avait aucune nécessité de déroger au principe du contradictoire et que l’Etat aurait pu procéder autrement pour obtenir une restitution que par surprise.

→ Pourquoi l’Etat n’a-t-il pas pu obtenir le maintien de la mise sous séquestre de la sculpture ?

La Cour d’appel a estimé que les circonstances de l’espèce ne permettaient pas de justifier le recours à une procédure contradictoire dès lors que :

  • L’Etat aurait pu saisir le juge des référés, par une assignation d’heure à heure, dès le mois d’avril 2022, date à laquelle il avait formulé son intention de revendiquer l’œuvre. Or, une action n’a été intentée que quelques jours avant la fin de l’exposition, soit deux mois après.
  • L’Etat ne rapporte pas la preuve d’un risque concret de rapatriement de l’œuvre en Suisse en cours d’exposition[1] – une résiliation préalable du contrat de prêt étant nécessaire.

En conséquence, la Cour a rétracté l’ordonnance de séquestre, du fait de son irrégularité, et a ordonné la restitution de la sculpture à son propriétaire.

Une discussion au fond sur la propriété de la sculpture est toujours possible.

→ Dans quels cas l’Etat agit-il pour obtenir la restitution de biens appartenant au domaine public ?

L’Etat agit[2] exclusivement lorsqu’il a acquis la certitude ou, du moins, l’intime conviction, qu’il dispose d’éléments suffisants pour prouver que le bien culturel se trouvant entre des mains privées :

  1. A été autrefois volé ou est sorti irrégulièrement du domaine public ;
  2. Constitue des archives publiques depuis son origine.

Dans ces hypothèses, seul l’Etat, représenté par l’administration chargée des domaines[3], a le pouvoir d’agir devant le juge judiciaire. Cependant, dans cette affaire, la cour d’appel a admis que le Centre National pour les Arts Plastiques (CNAP) assiste l’Etat pour suivre les instances intéressant son droit à la propriété.

→ Quel est le risque pour le propriétaire de l’œuvre dont la propriété est revendiquée par l’Etat ?

Lorsqu’il est fait droit à l’action en revendication de l’Etat, le propriétaire de l’œuvre, même de bonne foi, est tenu de le restituer[4]. Cela s’explique par les principes d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité des biens relevant du domaine public. Toutefois, si le bien en question a été acquis lors d’une vente, l’acheteur mis en demeure de restituer l’œuvre bénéficie d’une action en garantie d’éviction contre son vendeur personne privée[5], sous réserve des dispositions réglant la prescription en matière mobilière[6].

Si l’État tarde à en demander la restitution, le préjudice lié à la perte de jouissance du bien peut être réparé dès lors que le détenteur supporte une charge exorbitante (pour plus de précisions sur les conditions d’indemnisation, nous vous invitons à lire ou à redécouvrir notre article sur le sujet).

 


[1] Au contraire, le juge des référés avait ordonné la mise sous séquestre d’une œuvre, dans une affaire où les propriétaires d’origine américaine avaient déclaré leur intention de ramener l’œuvre prêtée aux Etats-Unis sitôt la fin de l’exposition (TGI Paris, réf. 30 mai 2017, n°17/52.901).

[2] A titre d’illustration, les juges ont ordonné la restitution des biens suivants : les archives du général François de Chasseloup-Laubat ainsi que leurs copies (Cass. Civ. 1e, 21 juin 2018, n°17/19.751), un bureau Louis XVI inscrit à l’inventaire annexe du Mobilier national (TGI Paris, 6 janvier 2015, n°14/01.319) ou un manuscrit de l’architecte et historiographe André Félibien acquis en 1719 par la Bibliothèque royale (CE, 28 juillet 2017, n°392122).

[3] Articles R. 2331-1 et R. 2331-2 du code général de la propriété des personnes publiques.

[4] TJ Paris, 17 mars 2021, n° 18/07785 : le propriétaire de bonne foi ne peut pas invoquer l’inaction de l’État lors de précédentes ventes aux enchères comme renonciation à la revendication.

[5] Article L. 112-23 du code du patrimoine renvoyant expressément à l’article 1626 du Code civil.

[6] Article 2224 du Code civil : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. » Etant entendu que la mise en demeure par l’Etat de restituer le bien ne constitue pas nécessairement le fait permettant à l’acheteur d’exercer son action en garantie.

Cour d’appel de Paris, 16 janvier 2024, RG n° 20/17979


🎨 En 2013, un artiste peintre a confié à une galerie d’art plusieurs œuvres par le biais d’un contrat intitulé « mise en dépôt d’œuvres d’art ». En 2017, l’artiste indique à la galerie qu’il souhaite mettre fin à leur partenariat et se voir restituer l’ensemble des œuvres confiées. La galerie refuse la restitution et assigne l’artiste, invoquant la rupture fautive et brutale de leur relation.

💡 Selon jugement du 12 novembre 2020, le Tribunal judiciaire de Paris a condamné l’artiste à verser à la galerie des dommages-intérêts. Le Tribunal considère que le contrat conclu entre les parties est un mandat d’intérêt commun, caractérisé par l’existence d’une communauté d’intérêts entre eux et qui ne pouvait être révoqué sans motif légitime ou préavis, à la différence du mandat classique. La jurisprudence caractérise le mandat d’intérêt commun dès lors qu’il y a « intérêt du mandant et du mandataire à l’essor de l’entreprise par création et développement de la clientèle » (Cass. com., 20 févr. 2007, n° 05-18.444). L’artiste peintre a contesté cette qualification de mandat d’intérêt commun et a fait appel du jugement.

⚠️La Cour d’appel a jugé que le contrat présentait une communauté d’intérêts car il bénéficiait aux deux parties, notamment en ce que la galerie s’efforçait de faire reconnaître l’artiste et de valoriser son œuvre. Elle approuve le jugement en ce qu’il a requalifié le contrat de dépôt en mandat d’intérêt commun. En effet, les parties ont « entendu se lier au-delà du mandat de dépôt simple par lequel [l’artiste] confiait ses œuvres à la galerie, celle-ci étant pour sa part mandatée pour les vendre, moyennant une commission que cet écrit ne fixe pas mais dont le montant de 50 % effectivement appliqué sur chaque vente réalisée, n’a jamais fait l’objet d’aucune contestation dans le cours de la relation ni d’ailleurs après sa rupture. »

En l’absence de préavis raisonnable, l’artiste avait rompu le contrat de manière brutale et fautive et a été condamné par la Cour d’appel à indemniser la galerie à hauteur de 19.347, 25 euros en réparation des pertes de chance de commissionnement découlant de la rupture des relations contractuelles et à hauteur de 2.000 euros en réparation du préjudice né de la désorganisation des rapports avec sa clientèle.

La galerie, quant à elle, a été également condamnée à indemniser l’artiste à hauteur de 5.000 euros représentant, d’une part, la perte de chance de vendre trois tableaux tardivement restitués en novembre 2019 et, d’autre part, en réparation du préjudice résultant de la contrefaçon de ses œuvres par le biais de leur production et de leur présentation non autorisée sur le site internet de la galerie. Enfin, la Cour d’appel a condamné la galerie à payer l’artiste la somme de 660,39 euros en réparation de son préjudice matériel résultant de la non-perception de sa quote-part sur la vente d’une œuvre en 2019.

TJ Paris, ord. réf., 20 mars 2024, n° 24/50849

⚖️ Si d’ordinaire le juge des référés ne peut prononcer la résiliation d’un contrat car cette question relève d’un débat au fond et qui ne peut être tranchée en référé, ce dernier est toutefois compétent pour « prendre acte » de la résiliation d’un contrat dès lors que « les conditions contractuelles de la résiliation de plein droit sont acquises et [qu’] il y a lieu de le constater ».


En l’espèce, un auteur a cédé les droits d’auteur de deux de ses ouvrages à une maison d’édition.

📚 Conformément à l’article L.132-12 du code de la propriété intellectuelle, l’éditeur a une obligation de diffusion commerciale et d’exploitation permanente et suivie des ouvrages. L’article L. 132-17-3 du même code prévoit que si l’éditeur ne satisfait pas à ses obligations de reddition de compte, le contrat est résilié de plein droit trois mois après mise en demeure de l’auteur non suivie d’effet.

 

Constatant une absence d’exploitation permanente et suivie de ses œuvres ainsi que l’absence de reddition des comptes, l’auteur a introduit une première procédure de référé devant le tribunal judiciaire de Paris pour exercer son droit d’information sur les conditions réelles de fabrication, diffusion commerciale et vente des ouvrages depuis 2019. Le président du tribunal judiciaire de Paris a exigé que l’éditeur fournisse, sous astreinte, un rapport certifié par un expert-comptable, détaillant le nombre d’exemplaires de chaque livre produit, vendu, en stock ou détruit entre 2019 et 2022, ainsi qu’un résumé des efforts de promotion des œuvres. L’éditeur a alors produit des documents partiels et l’auteur l’a de nouveau assigné en référé pour qu’il lui soit donné acte de la résiliation de plein droit des contrats de cession de droits d’auteur.

 

Le juge des référés a retenu que l’auteur avait demandé des comptes à l’éditeur concernant la publication de ses ouvrages en février 2022, et que ces derniers n’avaient été fournis que le 27 juillet 2023, confirmant que les ventes étaient bien inférieures aux années précédentes. De plus, un courriel de février 2021 indiquait que les livres étaient en cours de réimpression, mais un constat d’huissier de novembre 2022 révélait que les livres étaient toujours indisponibles sur plusieurs sites internet spécialisés.

 

⚖️ Dès lors, le juge des référés constatant une atteinte aux droits d’auteur caractérisée dont il résultait un trouble manifestement illicite, a pris acte de la résiliation de plein droit des deux contrats d’édition.

💡 Le 4 avril 2024 a été annoncée la création d’un fonds d’indemnisation pour les auteurs confrontés à la liquidation judiciaire de leur maison d’édition par le Syndicat national de l’édition (SNE) et la Société des gens de lettres (SGDL), avec le soutien de la Société française des intérêts des auteurs de l’écrit (Sofia).

 

🖋 Avec ce fonds d’indemnisation, les auteurs pourront désormais déposer une demande devant la SGDL pour les créances non honorées après la liquidation, qui sera soumise à une commission d’évaluation afin d’être indemnisé.

 

💶 Les paiements, sous forme de droits d’auteur, couvriront partiellement ou totalement les créances non recouvrées, en fonction des disponibilités du fonds et du nombre de demandes.

 

Cette initiative répond aux exigences de la loi n° 2021-1901 du 30 décembre 2021, visant à stabiliser l’économie du livre et à renforcer la transparence et la solidarité entre ses intervenants. Pour rappel, cette loi a modifié l’article L.132-15 du code de la propriété intellectuelle, obligeant les maisons d’édition à :

 

–              Produire un état des comptes à date de la cessation adressé à chaque auteur sous contrat avec l’entreprise par l’éditeur ou, le cas échéant, le liquidateur dès lors qu’a été prononcée la cessation d’activité de l’entreprise d’édition ou conséquemment à une décision judiciaire de liquidation, soit du fait d’une cessation d’activité volontaire.

 

–              Faire apparaître dans l’état des comptes le nombre d’exemplaires des ouvrages vendus depuis la dernière reddition des comptes établie, le montant des droits dus à leur auteur au titre de ces ventes ainsi que le nombre d’exemplaires disponibles dans le stock de l’éditeur.

 

Actuellement, le fonds est entièrement financé par la Sofia.

 

Ce dispositif est créé à titre expérimental pour une période de deux ans mais il pourra être prolongé et être amené à évoluer.

PHOTOGRAPHIE DE RUE, DROIT A L’IMAGE ET VIE PRIVEE

 

Henri Cartier-Bresson, Vivian Maier, Diane Arbus, Joel Meyerowitz, Robert Doisneau… De nombreux photographes célèbres se sont attelés à la photographie de rue. Cette pratique consiste à prendre des clichés dans un lieu public, en présence d’une ou plusieurs personnes afin de capturer une scène authentique du quotidien, prise spontanément, sur le vif. Mais qu’en est-il du droit à l’image lorsqu’un individu est identifiable sur la photographie et que ce dernier s’oppose à la captation et/ou à la diffusion du cliché ? Cette question s’est posée à de nombreuses reprises devant les tribunaux, par exemple pour le fameux cliché « Baiser de l’Hôtel de Ville » de Robert Doisneau, prise en 1950 [1]. Cette affaire renvoie à une problématique récurrente :

 

A-t-on le droit de prendre en photo une personne dans la rue sans son consentement ?

Quels sont les risques et les enjeux de la photographie de rue au regard du droit à l’image et du droit à la vie privée ?

 

  • La distinction lieu public et lieu privé

 

La pratique de la photographie, comme la photographie de studio, peut se dérouler dans un lieu privé. Il se définit comme « l’endroit qui n’est ouvert à personne, sauf autorisation de celui qui l’occupe » [2], et ce « peu important que ce lieu se trouve inclus dans un bâtiment ouvert au public » [3]. Le domicile en est un exemple.

Dans cet espace, la fixation et la publication de l’image d’une personne peut être, en l’absence de tout consentement expresse ou tacite, constitutif d’un délit d’atteinte à l’intimité de la vie privée, d’après l’article 226-1 du code pénal, punissable d’un an d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende.

⚠️ Toutefois, il existe une présomption de consentement du sujet de la photographie au profit du photographe dès lors que la photographie a été enregistrée au vu et au su des sujets qui ne s’y sont pas opposés alors qu’ils étaient en mesure de le faire [4].

 

Le lieu public se définit comme le « lieu accessible à tous sans autorisation spéciale de quiconque, que l’accès en soit permanent ou conditionnel, ou subordonné à certaines conditions, heures ou causes déterminées » [5]. Ainsi, tout lieu dans lequel on peut pénétrer sans y avoir été invité personnellement, même s’il faut acheter un billet, constitue un lieu public (par exemple, le métro, le cinéma ou la piscine).

⚠️ Dès lors, dans un lieu public, le fait de prendre une image d’une personne peut constituer une atteinte à sa vie privée et à son droit à l’image mais à certaines conditions seulement.

 

  • Dois-je recueillir le consentement de la personne que je souhaite photographier dans un lieu public ?

 

Si la personne apparaît de manière accessoire et quasiment fortuite sur une image, aucune atteinte à son droit à l’image ou au respect de sa vie privée ne peut, en principe, être constatée [6].

 

Par contre, si la personne constitue le sujet principal et reconnaissable de l’image et apparaît de manière isolée, il est nécessaire d’obtenir son consentement tacite ou expresse préalable [7].

 

🥑 Les risques : Dans un lieu public, lorsque la personne est identifiable et reconnaissable, je risque d’engager ma responsabilité en tant que photographe [8]. L’appréciation ddu caractère identifiable ne se fait pas à partir du public en général, mais en tenant compte des proches de la personne en cause pouvant la reconnaître. Dans le cadre d’un contentieux, la charge de la preuve incombe alors à celui qui estime avoir subi une atteinte à son droit à l’image ou à sa vie privée [9]. Si je renonce à recourir à la signature d’autorisation pour la prise de mes images, je m’expose au risque d’être assigné(e) pour violation du droit à l’image et du respect de la vie privée d’autrui.

 

🥑 Nos conseils : Bien que le consentement puisse intervenir de manière tacite ou se déduire des circonstances [10], il est préférable d’obtenir une autorisation expresse. Cette autorisation fait l’objet d’une interprétation stricte [11] et doit être spéciale, c’est-à-dire préciser les utilisations autorisées [12]. L’autorisation ne doit pas être détournée du contexte dans lequel elle a été donnée [13].

 

⚠️ Attention : si je souhaite photographier un mineur, je dois obtenir le consentement de ses deux parents ou de toute personne détentrice de l’autorité parentale [14].

 

  • Publication ou captation ?

 

On estimait traditionnellement que ce n’était pas l’acte de la prise de photo qui constituait une atteinte au droit à l’image mais l’acte de publication et de diffusion [15]. Or dans une décision récente, la Cour de cassation a rappelé le principe de la responsabilité de plein droit en matière de violation des droits de la personnalité incluant le droit à l’image [16]. Reprenant et précisant la jurisprudence constante de la Cour européenne des droits de l’homme [17], elle rappelle que la maîtrise par un individu de son image implique la possibilité de refuser la diffusion de son image mais comprend également le droit pour lui de s’opposer à la captation et la conservation de celle-ci par autrui.  En effet, l’image constitue une caractéristique attachée à la personnalité de chacun dont la protection suppose le consentement de l’individu dès sa captation et non pas uniquement au moment de sa potentielle diffusion au public.

 

 

  • Est-ce que la réponse est identique si ma démarche est artistique ?

 

La liberté d’expression artistique est parfois invoquée pour justifier l’atteinte aux droits d’autrui. Les tribunaux estiment qu’en matière de photographie de rue, la liberté d’expression artistique prime sur le droit à l’image, de sorte que ce dernier ne peut donner lieu à l’interdiction de publication d’une image [18].

 

Toute autre solution aurait pour conséquence, dans le domaine de l’art photographique, de contraindre l’auteur des clichés à « solliciter systématiquement le consentement des personnes à ce que leur image puisse être fixée, puis ensuite publiée, ce qui aurait pour effet de compromettre les photographies prises sur le vif ou la représentation de scènes de rue » [19].

 

Toutefois, il existe deux exceptions à ce principe :

  • L’image ne doit pas constituer une atteinte à la dignité humaine de la personne représentée.
  • La publication ne doit pas avoir des « conséquences d’une particulière gravité» sur la vie privée de la personne photographiée [20].

 

⚖️ Dans une affaire du 5 novembre 2008, intentée à l’occasion de la parution d’un recueil de photographies intitulé « Perdre la tête » du photographe François-Marie Banier [21], la Cour d’appel a rendu un arrêt important concernant le droit à l’image et le droit à la vie privée.  Invoquant les deux droits précités, la requérante demandait le retrait de cet ouvrage d’une image sur laquelle elle apparaissait de manière identifiable, ainsi que l’indemnisation de son préjudice. Elle considérait que la publication de cette photographie, au sein d’un recueil mettant en avant des individus excentriques, marginaux ou exclus de la société, revêtait un caractère dégradant attentatoire à sa dignité.

Les juges ont rejeté ces arguments estimant que le cliché anodin ne relevait aucun élément d’ordre privé, ni n’était dégradant. Ils ont considéré que le droit à l’image devait céder devant la liberté d’expression chaque fois que l’exercice du premier avait pour effet de faire arbitrairement obstacle à la liberté de communiquer des idées, notamment par le travail d’un artiste.

 

⚠️ Tout le monde ne peut se prévaloir de l’exception de liberté d’expression artistique. En effet, il faut établir le caractère artistique de l’image en cause. Ce caractère est souverainement apprécié par les juges [22] en se référant notamment aux critères de qualification de l’ « œuvre de l’esprit » au sens de l’article L. 112-2 du code de propriété intellectuelle ou en analysant la démarche intellectuelle du photographe pour déterminer si celle-ci est artistique [23].

 


[1] Cass., Civ. 1ère, 16 mars 1999, n°97-11.465.

[2] Cass., Crim., 28 novembre 2006, n° 06-81200 : définition prétorienne.

[3] Cass., Crim., 26 octobre 2010, n° 09-81.492.

[4] Art. 226-1 du code pénal.

[5] TGI Paris, 23 octobre 1986, Gaz. Pal. 1987, 1, 21 et Cass., Crim., 28 juin 1988, n° 87-85.460 : définition prétorienne.

[6] Cass., Civ. 1re, 12 décembre 2000, n° 98-21.311 ; Cass, civ 1re, 25 janvier 2000, n° 97-15.163.

[7] Cass., Civ. 1re, 12 décembre 2000, n° 98-21.311 ; Cass, civ 1re, 25 janvier 2000, n° 97-15.163.

[8] TGI Paris, 21 février 1974, D. 1974. 530, note R. Lindon ; cf. également Cass, Civ. 1re, 21 mars 2006, n° 05-16.817.

[9] Paris, pôle 1, ch. 2, 28 mars 2019, RG n° 18/22.397 ; TGI Nanterre, 15 oct. 2001, Légipresse 2002, I 29.

[10] Cass., Civ. 1re, 7 mars 2006, Bull. civ. I. n° 139.

[11] Cass., Civ. 1re, 4 novembre 2011, n° 10-24.761.

[12] Cf. TGI Paris, 18 mai 2009, Légipresse 2009. I. 113.

[13] Paris, 11e ch., B, 19 octobre 2006, RG n° 05/06562.

[14] Cass, Civ. 1re, 27 février 2007, n° 06-14.273.

[15] §431.143, Pratique du droit de la presse, Christophe Bigot, Dalloz, Hors collection, 2020.

[16] Civ. 1re, 2 juin 2021, n° 20-13753.

[17] CEDH, 15 janv 2009, Reklos et Davourlis c/ Grèce, n° 1234/05 ; CEDH, 27 mai 2014, De la Flor Cabrera c/ Espagne, n° 10764/09.

[18] TGI Paris, 2 juin 2004, Légipresse 2004, III, p. 156, note Ch. Bigot : la liberté d’expression artistique doit primer à chaque fois que « l’exercice par un individu de son droit à l’image aurait pour effet de faire arbitrairement obstacle à la liberté de recevoir ou communiquer des idées qui s’exprime spécialement dans le travail d’artiste » ; CA Paris, 11e ch. sect. A, 5 nov. 2008 ; §423, Dalloz, Répertoire de droit civil : Paris, 5 novembre 2008.

[19] TGI Paris, 9 mai 2007, D. 2008. 57.

[20] Art. 9 et 16 du Code civil ; CA Paris, 11e ch. sect. A, 5 nov. 2008 ; §423, Dalloz, Répertoire de droit civil : Paris, 5 novembre 2008.

[21] CA de Paris, 17eme chambre, 5 novembre 2008, n° 07/10198.

[22] Recueil Dalloz, 2009, p. 470, La liberté de création prévaut, dans certaines limites, sur le droit à l’image, Christophe Bigot.

[23]   TGI de Paris, 2 juin 2004, Ben Salah c/ Delahaye, Agence Magnum, Légipresse 2004. III. 156 et TGI de Paris, 9 mai 2007, n° 06/03296, Chastenet de Puysegur c/ Gallimard et Banier.